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Philippe Murer : « L’avenir économique de l’Occident »

philippe murer économie et inflation

Crédits photo : Shutterstock

1 – État des lieux

Le grand évènement économique récent est la résurgence de l’inflation pour la première fois depuis les années 70. Une question se pose cependant : une forte inflation est-elle pour autant l’annonce d’une fin de cycle comme à la fin des trente glorieuses, d’un modèle économique pris dans ses contradictions ?

L’inflation qui s’est établie à des records de 10 % aux États-Unis et en Europe à la fin de l’année 2022 a fait baisser le pouvoir d’achat des ménages, les salaires augmentant nettement moins vite que l’inflation. Cette baisse du pouvoir d’achat a donc fait baisser la consommation et entraîné les pays vers la récession. Si la France n’est pas encore en récession, l’Allemagne et la zone Euro y sont déjà entrées. Aux États-Unis, les ménages consomment par l’augmentation de leur endettement, permettant ainsi à la croissance de tenir pour l’instant autour de 2 %.

Alors que nous flirtons avec la récession, les bourses américaines et européennes ont établi des plus hauts ou restent proches de leurs plus hauts historiques. Pourquoi ce phénomène jamais vu auparavant ? La première raison est le pouvoir oligopolistique de nombreuses multinationales : même en période de baisse de la demande, elles arrivent à augmenter leurs marges ! La deuxième raison est la conviction, justifiée, que les banques centrales feront tout pour éviter une crise financière et favoriseront les marchés financiers comme toujours depuis 2008. Ainsi, la spéculation se déchaîne, même en période de risque élevé. Entre le risque de crise financière et le risque d’inflation, les banques centrales ont ainsi décidé de pencher pour moins de risques de crise financière et plus de risques d’inflation. Par conséquent, elles ont pris le parti des multinationales et des banques contre le peuple.

De fait, le constat est clair : la crise financière qui menace ne se situe pas dans les marchés financiers mais bien dans le portefeuille de chaque ménage. Le niveau de vie baisse très rapidement. Les Gilets jaunes l’avaient signalé lors des manifestations de 2018. Aujourd’hui, la baisse est nettement plus dramatique : la moitié des personnes payées au SMIC en France ne mangent pas à leur faim ou sautent des repas. La consommation française en biens a baissé de 10 % en deux ans, revenant à des niveaux jamais vus depuis 2007. 

Nous en sommes là : l’Occident commence à avoir faim, nous ne sommes plus en progression mais dans une régression qui est dramatique pour les classes populaires. La hausse de 10 % des prix de l’électricité en juillet suivant une précédente hausse de 15 % en janvier, la fin du bouclier tarifaire sur l’énergie, tous ces paramètres ne vont faire qu’empirer encore un peu plus la situation. De quoi affamer de plus en plus de Français… La raison de ces hausses insensées des prix de l’énergie en Europe, c’est la coupure avec notre grand fournisseur d’énergie russe mais aussi la délégation de l’énergie au secteur privé et la dérèglementation du secteur de l’énergie. Ainsi, la hausse du tarif règlementé par l’État de l’électricité de 10 % en juillet est faite alors qu’EDF gagne 5,8 milliards d’euros au 1er semestre 2023 ! Il n’y avait aucun besoin de relever ce tarif fixé par l’État. L’objectif n’est pas de satisfaire l’entreprise publique mais de sauver les fournisseurs alternatifs qu’on devrait nommer parasites alternatifs puisqu’ils gagnent de l’argent sans rien produire et parfois en fraudant. Bien entendu, la seule chose qui reste au gouvernement est de faire croire aux Français via sa propagande que les tarifs règlementés qui existent depuis 20 ans font partie d’un bouclier tarifaire qui couterait de l’argent à l’État… Cette incompétence crasse et ce mépris pour le peuple de nos gouvernements expliquent que l’Europe coule. Autre exemple d’incompétence : au lieu de construire (d’avoir construit surtout) une industrie des puces électroniques et semi-conducteurs sur le long terme, avec des aides et des commandes publiques réservées, les gouvernements achètent sur leur sol des usines détenues par des entreprises étrangères à coup de dizaines de milliards d’euros, entreprises qui partiront quand les subventions auront été dépensées. Si les États-Unis ne se tirent pas des balles dans le pied à la même vitesse, le régime vieillissant avec Biden au pouvoir rappelle furieusement l’URSS juste avant la chute.

Le Banquet numéro 7
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