Thierry Breton : de prince du secteur privé à roi de la Commission européenne
Thierry Breton est l’une des personnalités les plus importantes de la Commission européenne, de celles qui pèsent sur les décisions qui impactent la vie de centaines de millions de citoyens. Un poste à la hauteur de l’homme, après une carrière auréolée de succès ? Vous risquez d’être déçus !
Le parcours de Thierry Breton regorge de dossiers compromettants et de décisions hasardeuses. Corruption, conflit d’intérêts, délit d’initiés, favoritisme… Alors que les élections européennes approchent à grands pas, l’occasion était trop belle pour revenir sur le parcours de celui qui se verrait bien calife à la place de la calife von der Leyen… malgré tout !
Accrochez vos ceintures : le voyage s’annonce mouvementé !
Le parcours de Thierry Breton
Né à Paris en 1955, Thierry Breton est passé par les plus grandes écoles du pays : de l’École alsacienne à la classe préparatoire aux grandes écoles du lycée Louis-le-Grand de Paris, avant de valider son diplôme d’ingénieur de l’École supérieure d’électricité (Supélec)… Bref, Breton est un pur produit des écoles françaises qui forgent et forment les élites de demain.
Tout au long de sa carrière, Thierry Breton a montré qu’il n’y avait qu’un pas entre le privé et le public. Et si aujourd’hui la pratique semble bien plus courante, ce n’était pas le cas auparavant. En somme, Thierry Breton est un peu le Christophe Colomb du pantouflage en politique ! Petit tour d’horizon.
- De Bull à Atos : un parcours brillant mais contesté dans le privé
Dans le secteur privé, Thierry Breton a ses petites habitudes. Un scénario qui se reproduit presque à l’identique, au fur et à mesure des entreprises par lesquelles il est passé. Et quand la chance ne lui sourit pas, il se retrouve dans de belles affaires, nous y reviendrons dans quelques lignes.
Le scénario “à la Breton” est simple. Il devient directeur général d’une entreprise en partie nationalisée et en proie à de lourdes difficultés financières. Sous sa direction, cette entreprise connaît une lente privatisation et sort de la crise mais plonge de nouveau quelques années après son départ, menant parfois à la fermeture.
Ce scénario s’est d’abord produit chez Bull, que Thierry Breton rejoint en 1993. Il occupe successivement les fonctions de directeur de la stratégie et du développement, directeur général adjoint et vice-président du conseil d’administration. L’entreprise est privatisée à partir de 1994. De son côté, Breton sauve l’entreprise en rachetant des filiales d’autres structures. Quelques années après son départ, Bull est de nouveau en proie à de grosses pertes financières.
En 1997, Thierry Breton intègre Thomson, une autre entreprise nationalisée. Une nouvelle fois, le PDG redresse l’entreprise et la sauve de la faillite. En 2001, il est même nommé “stratège de l’année” par La Tribune. Dans le même temps, l’État privatise ses parts. En 2002, Thomson est de nouveau dans une crise importante.
Mais, entre-temps, Thierry Breton rejoint France Télécom. Sous sa direction, l’entreprise est privatisée et sort des difficultés financières qu’elle connaissait. En 2010, soit plusieurs années après son départ, la Harvard Business Review classe Thierry Breton à la 62ème place des patrons les plus performants au monde pour son intervention à France Télécom [1]. Pour autant, quand il part, les dettes s’accumulent de nouveau. France Télécom ferme en 2013.
Après son départ du ministère de l’Économie, il prend la direction d’Atos en 2008… et le sempiternel schéma se répète ! L’entreprise fait l’acquisition de nombreuses sociétés comme Siemens, Xerox ou Bull (oui, oui, la même entreprise que celle évoquée plus haut). En 2016, “il est élu par L’Usine nouvelle « Industriel de l’année » pour avoir doublé, en huit ans, la taille du groupe Atos, le tout sans endettement”. [2] En 2019, Thierry Breton quitte Atos. Quelques années plus tard, le géant de l’informatique est en proie à d’énormes difficultés financières et Daniel Kretinsky entre dans la danse pour participer au rachat [3].
- Conseiller, ministre, etc. : la belle vie politique de Thierry Breton
N’oubliez pas non plus que Thierry Breton est le roi du pantouflage ! Entre deux mandats dans le privé, notre homme n’a pas hésité à revenir dans le public au gré des postes qui lui étaient proposés.
En 1986, Thierry Breton fait son entrée dans le monde politique. Quelques années plus tôt, il rencontre Pierre Monory. Cette rencontre est décisive car, de 1986 à 1988, Breton devient son conseiller pour les questions liées à l’informatique et aux nouvelles technologies. Monory est alors ministre de l’Éducation nationale. Ensemble, ils lancent également la construction du Futuroscope dont Thierry Breton prend la direction jusqu’en 1990. Il devient conseiller régional de Poitou-Charentes et vice-président dans l’équipe exécutive de Jean-Pierre Raffarin jusqu’en 1992.
Sous le troisième gouvernement de Jean-Pierre Raffarin, il devient ministre de l’Économie en 2005. Il s’engage à mener une “politique de rigueur”, tentant au maximum de réduire la dette publique [4] mais également de moderniser la façon de concevoir l’économie en favorisant notamment l’accès des PME aux marchés financiers. Enfin, c’est lui qui, le premier, évoque la valorisation du patrimoine immatériel de la France [5].
Il faut attendre 2019 pour que Thierry Breton revienne dans la vie politique. Emmanuel Macron le propose alors comme membre de la Commission européenne chargé de la politique industrielle, du marché intérieur, du numérique, de la défense et de l’espace. Il n’est pas le premier choix du président français. Le 10 octobre 2023, sa première candidate, Sylvie Goulard, est refusée suite à des accusations d’emplois fictifs [6]. Thierry Breton est donc la deuxième option de Macron et ce, malgré les affaires qu’il traîne [7].
Vous l’aurez compris : Thierry Breton est une personnalité incontournable du paysage économique et politique français depuis près de 40 ans. Il a été PDG pour plusieurs entreprises immenses qu’il a contribué à redresser… ou pas ! En parallèle, il a collaboré avec des personnalités politiques importantes, de Jean-Pierre Raffarin à Emmanuel Macron. Pourtant, depuis bien des années, les dossiers ne manquent pas autour de ce personnage étonnant. Justement, parlons-en !
Les casseroles de Thierry Breton
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Sources :
[1] https://archive.wikiwix.com/cache/index2.php?url=http%3A%2F%2Fhbr.org%2Fweb%2Fextras%2F100ceos%2F62-breton [2] https://www.usinenouvelle.com/article/thierry-breton-pdg-d-atos-industriel-de-l-annee-2016.N457462 [3] https://www.youtube.com/watch?v=EQZQumW4pI0 [4] https://www.lemonde.fr/societe/article/2005/03/02/deficits-publics-thierry-breton-s-engage-a-mener-une-politique-de-rigueur_400116_3224.html [5] https://archive.wikiwix.com/cache/index2.php?url=http%3A%2F%2Fwww.lefigaro.fr%2Fdebats%2F2006%2F12%2F09%2F01005-20061209ARTFIG90860-l_immateriel_la_croissance_de_demain.php#federation=archive.wikiwix.com&tab=url [6] https://www.lemonde.fr/idees/article/2019/10/11/commission-europeenne-les-lecons-d-un-camouflet-pour-emmanuel-macron_6015181_3232.html [7] https://www.lemonde.fr/international/article/2019/10/24/commission-europeenne-macron-propose-thierry-breton-a-la-place-de-sylvie-goulard_6016705_3210.html