Rémi Tell : « La société industrielle et son avenir : l’ouvrage du siècle ? »

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Remi Tell
Crédits photo : Shutterstock

L’été 2023 approchant, je trépignais de retrouver l’odeur de ma terre, le chant rythmé de son océan et ceux qui, au terme de leur année de labeur, y convergeraient pour d’attendues semaines d’insouciance. Mais le 10 juin, Theodore Kaczynski est mort ; lui dont j’avais au printemps précédent dévoré le manifeste, de la façon dont on met à jour un trésor enfoui depuis presque trente d’années. 

L’été, pour moi, promettait donc d’être gâché. Adieu la farniente à l’ombre des pins. Et pour cause : lorsqu’ils disparaissent, on ne peut plus différer les promesses faites aux vivants. Un serment silencieux avait en effet conclu ma lecture de La société industrielle et son avenir : glisser ce prophétique dans la bibliothèque d’un grand nombre de Français

Indubitablement, l’ouvrage compte parmi les plus capitaux pour comprendre le monde actuel et le changer. De la désagrégation sociale au transhumanisme, des injections spike au malaise existentiel de l’Homme occidental, du crédit social à l’idéologie woke, aucune actualité de notre époque n’avait échappé aux anticipations de son auteur. Ted Kaczynski n’était pas tant devin qu’extralucide sur son temps : du capharnaüm moderne, il a extrait le principe actif et explicatif. Puis il en a tiré le fil, jusqu’à projeter en pensée la conclusion de cette dynamique. Démontré aussi – et c’est sans doute le plus essentiel – que l’engrenage tragique pouvait encore être désamorcé. 

Revenons à l’idée principale de l’œuvre : la technologie condamne à mort notre liberté et notre dignité. Pour une raison toute simple : « la civilisation des machines est elle-même une machine » et l’Homme y fait office de rouage. Pour ne pas que la machine s’enraye nous dit Kaczynski, le rouage humain doit être parfaitement ajusté. Aucun jeu, aucun imprévu possibles dans cette mécanique. Or, voici bien le sens profond du mot « liberté » : ce qui rend l’avenir imprévisible.  

Mais comment assurer un réglage si fin, dès lors que notre espèce aspire spontanément à la maîtrise des paramètres de sa vie ? Puisque qu’elle souffre d’être ce rouage, jusqu’à menacer de le faire sauter ? Kaczynski avance donc qu’il existe un unique salut pour le système industriel : renforcer indéfiniment son contrôle sur le corps et l’esprit de l’Homme. Par la manipulation psychologique (propagande médiatique et scolaire), biologique (psychotropes, drogues) et génétique. Le philosophe-terroriste décrit ainsi une marche univoque (le monde progresse exclusivement vers une technologisation accrue), totalitaire (la technique rend en charge tous les aspects de la vie humaine), mais aussi ambivalente. Car d’une part, c’est vrai, la société industrielle a transformé l’Homme en animal domestique : ses besoins vitaux sont satisfaits sans réel effort, et pour le reste, il n’a pas la prise sur les phénomènes qui affectent ses conditions concrètes d’existence. Mais d’autre part, le monde technologique offre des contreparties de poids à la servitude humaine : santé, confort et sécurité en sont les principales. Quel parent résistera à ce que son enfant soit « dressé » à l’école, si c’est la condition pour le rendre employable ? Quel parent refuserait que l’on administre à son fils ou sa fille une thérapie génétique éliminant, par exemple, une prédisposition au cancer ou au crime ?

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