L’IA qui peignait comme Van Gogh
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Vous aussi, il vous est arrivé de vous émouvoir à la vue d’une peinture remarquable, ou de faire d’un tube de l’été le leitmotiv de vos amours de vacances.
On trouve dans l’art l’écho de nos vies. À voir hors de soi des émotions intimes figurées avec autant de justesse, on se sent soudain plus fort, moins seul.
C’est comme si le cours général des choses nous écrasait un peu moins.
Mais maintenant, j’aimerais vous poser une question…
Pensez-vous pouvoir éprouver des émotions aussi pures et profonde devant de l’art qui serait produit par une machine ?
Si l’on extrait complètement l’humain de la création artistique, est-elle encore capable d’émouvoir ?
Je vous présente « Salvador » DALLE
L’entreprise OpenAI a développé une Intelligence Artificielle spécialisée dans la génération d’images, baptisée DALLE ou DALL-E – en hommage à Salvador Dali.
DALLE est capable, à partir de mots-clés, de générer des images d’une précision saisissante.
Par exemple, quand on lui demande de créer une image avec les mots-clés « Albert Einstein portant des lunettes de VR dans une galaxie, dans le style d’une peinture à l’huile de Vincent van Gogh », voici ce que l’IA nous génère :
Saisissant, n’est-ce pas ?
Surtout quand on se rappelle que l’IA génère véritablement les images.
Elle ne peut se servir de modèles que pour repérer des motifs récurrents, pas pour les « fusionner » en une seule image ni s’en servir comme d’un template.
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Les graphistes au chômage ?
D’après le fonds technologique ARK Invest, une IA comme DALLE pourrait, à terme, prendre la place de graphistes humains pour des tâches de création visuelle.
Outre la précision croissante de leurs productions, ces IA ont l’avantage de travailler (presque) gratuitement.
La création des images d’Einstein que vous voyez ci-dessus auraient pris en moyenne 5,2 heures à un graphiste humain, pour un coût estimé de 150$… DALLE n’a pas encore vocation à être un service payant, mais on estime que l’IA pourrait produire ces images pour à peine 0,01 $… soit plus de 99,99 % de moins que ce que coûte un graphiste humain.
Il y a encore du chemin, mais à mesure qu’OpenAI perfectionne son DALLE, celui-ci devient capable de composer avec de plus en plus de paramètres (de l’ordre de plusieurs milliards), et surtout, sa vitesse d’apprentissage croît exponentiellement.
Avant leur disparition probable, les graphistes feront certainement office d’intermédiaires entre la machine et le client, en appliquant des filtres et des micro-ajustements aux productions de l’IA…
Puis, la machine intègrera ses modifications dans son programme d’apprentissage jusqu’à devenir capable d’éditer ses propres créations sur demande du client.
Quand nos peintres préférés seront des IA…
Je ne sais pas vous, mais à ce stade je trouve déjà ça vertigineux. Un peu glaçant, aussi.
Mais ça ne s’arrête pas là.
La production d’images utiles, à vocation éditoriale ou commerciale, ça ne touche pas encore aux tréfonds de l’âme humaine. On peut admirer la prouesse de l’IA sans se sentir dépossédé de ce qui fait le propre de l’homme…
Mais pensez au jour où l’IA sera capable de traduire cet incommunicable qui nous lie ? Quand elle saura faire de l’art qui nous touche ?
C’est déjà en train d’arriver.
Le collectif artistique Obvious a utilisé une IA pour produire le portrait ci-dessous, baptisé « Edmond de Belamy » :
Bon, je ne trouve pas ça fantastiquement beau, mais l’anecdote ne s’arrête pas là.
Cette toile a été vendue aux enchères chez Christie’s pour 432’000 $.
Bien sûr, l’art moderne est assez largement une arnaque esthétique et intellectuelle, dont la seule vocation est de permettre à des milliardaires de défiscaliser leurs gains.
Mais quand même : l’œuvre d’une IA vendue aux enchères, c’est un signe des temps.
D’autant qu’Edmond de Belamy est davantage un coup marketing qu’autre chose… Mais les IA qu’on entraîne à faire de l’art « pour de vrai », il y en a de plus en plus, et ce qu’elles produisent commence à distiller un charme vénéneux. Jugez plutôt :
Quand la machine fait de l’art, cesse-t-on de croire en Dieu ?
À ce stade, on peut déjà imaginer ce qui adviendra.
L’IA va progresser pour atteindre le niveau des grands maîtres, et produira des œuvres qu’on prendra pour des Monet ou Renoir.
On sentira nous traverser un bref malaise, en pensant que nos émotions sont elles aussi, générées indirectement par la machine. On se questionnera sur leur réalité, leur profondeur ou leur véracité.
Tout ceci risque d’entamer le sentiment de divin, l’impression de communion, de grand tout… On se dira que nous ne sommes que des bouts de viande dans l’espace. On s’en voudra d’être également émus par la rage d’un semblable jetée sur toile ou l’exécution d’une série de tâches par algorithmes.
En clair : on aura l’impression que nos émotions en valent rien. On se sentira aussi malins que des chiens de Pavlov. Moins enfants de Dieu que singes améliorés.
Alors peut-être qu’on se ressaisira.
On se dira que la beauté du monde aussi réside dans l’exécution ultra-fine d’un grand plan, et que les mathématiques sont à la base de toute sa poésie.
En créant des IA, que fait-on sinon étendre le champ des applications mathématiques ?
Pourquoi la création par l’intermédiaire d’une machine, même autonome, serait-elle dépourvue de toute noblesse ? Il s’agit toujours, in fine, d’art humain.
L’algorithmique n’efface pas l’humanité, puisque sans nous elle ne serait pas. Elle efface l’individualité – c’est très différent.
Alors on parviendra à vivre, malgré ces machines qui réussissent même à traduire avec plus de justesse que nous ce qu’être humain veut dire.
Qui est Marc Schneider ?
Marc Schneider est le fondateur d’Argo Éditions, une entreprise d’édition financière et de recherche en investissement. Sa newsletter gratuite réunit chaque semaine plus de 60 000 lecteurs.
Ancien Risk Manager, Marc aide ses lecteurs à comprendre les rouages de l’investissement en bourse et en cryptomonnaies pour prendre en main leur avenir financier.
Sa newsletter traite de sujets variés : nouvelles technologies, cryptomonnaies, psychologie de l’investissement ou encore géopolitique… avec un dénominateur commun : comprendre le monde qui nous entoure pour mieux gérer ses finances.