Le Metaverse : quand Internet fusionne avec la réalité virtuelle

Impossible que ça vous ait échappé… Le groupe Facebook devient Meta. 

Changement de nom, changement de logo :  le “F” blanc sur fond bleu devient un signe infini (tordu) bleu sur fond blanc.

Ce changement est supposé traduire la nouvelle ambition du groupe : construire le Metaverse. 

C’est quoi, le Metaverse ?

Ce qu’on appelle « Metaverse » est encore très flou pour beaucoup de monde.

Mais voici ce qu’en dit Andrew Bosworth, le directeur de la technologie de Facebook : 

« Le Metaverse est un ensemble d’espaces virtuels que vous pouvez créer et explorer avec des personnes qui ne sont pas physiquement au même endroit que vous »

Or, pour moi cette définition a un sérieux problème : cela pourrait être la définition d’un réseau social ou d’un jeu en ligne. 

Or, le Metaverse n’est PAS un réseau social de nouvelle génération

Il y a une énorme différence entre le Metaverse et un réseau social comme Facebook, ou un jeu en ligne comme World of Warcraft.

La différence, c’est qu’en ce moment, si vous allez sur Facebook ou WoW, vous le ferez en étant assis derrière votre écran.

Le Metaverse veut vous emmener DANS l’écran. 

Comme dans Matrix.

Créer un monde qui s’intercale entre votre regard et la réalité… 

Mais comment est-ce possible ?

C’est simple.

Il faut savoir que les révolutions technologiques résultent généralement de la fusion de deux technologies préexistantes. 

Le Smartphone, c’est le téléphone portable + Internet.

Les véhicules autonomes, c’est la voiture + l’intelligence artificielle.

Le Metaverse, c’est Internet + la réalité virtuelle

Voilà, selon moi, la bonne définition du Metaverse. 

C’est la fusion de deux technologies préexistantes, qui permet de créer un univers virtuel dans lequel on pourra totalement s’immerger.

Si vous avez déjà essayé un casque de réalité virtuelle (VR), vous savez de quoi je parle. 

Le casque VR (voir image) vous transporte dans un univers visuel différent. 

Quand vous regardez un écran, même si vous êtes absorbé, vous êtes toujours dans la réalité. 

À côté de l’écran il y a vos mains, le bureau sur lequel votre ordinateur est posé… Et si vous vous retournez, vous ne voyez plus l’écran. 

Avec un casque VR, c’est votre vue dans son ensemble qui est emmenée dans un autre univers. 

Si vous vous retournez, c’est toujours cet univers parallèle qui est devant vous. Vous n’avez plus de contact visuel avec la réalité.

En clair : petit à petit, à mesure que l’on construit le Metaverse, on emmène toujours plus de vos sens dans un univers parallèle. 

D’abord, un casque va couper votre vue du monde réel, pour que vous ne voyiez plus qu’un monde virtuel. 

Ensuite, ce casque va intégrer des écouteurs, pour que ce soit le son de ce monde virtuel qui vous parvienne. 

La vue et l’ouïe sont les sens les plus simples à « couper » du réel. Mais ce n’est qu’une première étape. 

Quelle est l’étape suivante ?

Je vais être honnête : je ne sais pas ce qui va réellement se produire.

Mais je suis comme tout le monde, j’ai mes hypothèses. Et je me documente.

Selon moi, les prochaines évolutions du Metaverse seront de 2 natures : 

1. construire l’univers virtuel le plus complet possible (espaces virtuels à explorer, activités possibles, fonctionnalités générales…) ;

2. accroître toujours plus l’immersion sensorielle, pour que l’univers virtuel devienne aussi palpable que le monde réel.

Le point 1) ne devrait pas poser de problèmes. 

De nombreux jeux en ligne développent d’ores et déjà leur version immersive, où le joueur incarne son avatar 3D avec un casque VR, et voit tout à travers ses yeux. 

BMW a déjà commencé à créer des versions virtuelles de ses usines, pour organiser des visites virtuelles où que vous soyez dans le monde. 

N’oubliez pas que le Metaverse, c’est Internet libéré de son ultime frontière : l’écran. 

À titre personnel, je vois déjà des ponts tout faits avec d’autres révolutions technologiques : pourquoi pas des galeries d’art, remplies de NFT (ces œuvres d’art numériques), que leurs propriétaires exposeraient dans le Metaverse et feraient visiter contre de l’argent ? 

Le point 2) sera sûrement un défi technologique plus compliqué. 

Il s’agit de reproduire le toucher, l’odorat et le goût dans le Metaverse… 

Car même avec un bon casque VR, aujourd’hui si vous avancez trop, vous butez contre un meuble du monde réel. Car votre corps se trouve toujours dans le monde réel.

J’imagine (et c’est vraiment personnel) que nous verrons apparaître, sur le modèle des caissons de privation sensorielle, des caissons de réalité virtuelle, où ce ne sont plus seulement nos yeux et nos oreilles qui sont en immersion, mais tous nos sens et tout notre corps. 

Et même là, nous n’avons pas déroulé jusqu’au bout la possibilité théorique du Metaverse.

À quoi ressemblera le Metaverse une fois qu’il sera achevé ?

À travers ces exemples, j’imagine que vous avez compris : le Metaverse, c’est l’univers virtuel total. 

C’est « l’autre côté du miroir ». 

C’est l’oubli du corps, du monde physique… pour devenir un autre, dans un autre monde, aux possibilités infinies.

Voilà pourquoi il est si compliqué de parler du Metaverse : c’est une nouvelle réalité. 

Mais le plus dur, ce n’est pas d’imaginer le futur proche. 

C’est d’imaginer où vont toutes ces avancées.

Mais on peut déjà imaginer des exemples d’applications du Metaverse.

Il me semble inévitable qu’à un moment donné, quand on saura reproduire tous les sens dans un univers virtuel à partir de stimulations virtuelles, le marché du sexe virtuel va exploser.

C’est trivial, mais c’est la réalité du monde : les gens sont obsédés par le sexe, l’argent, et le pouvoir (pas toujours dans cet ordre). 

Cela a déjà été anticipé avec brio par la série Black Mirror avec son troublant épisode Striking Vipers… où deux amis deviennent amants dans un jeu vidéo de combat, où l’un d’eux incarne un personnage féminin.

Bien sûr, cet incident les pousse à s’interroger sur l’impact qu’ont ces activités virtuelles sur leur sexualité dans le monde réel.

Dans la même veine, le Metaverse risque (comme Internet, dans une certaine mesure), de devenir le déversoir des pulsions humaines. 

Il y a fort à parier qu’apparaîtront des réalités virtuelles, où, puisqu’elles sont virtuelles, on laisserait libre cours à nos pires instincts : ultraviolence, meurtres, stupre et excès en tous genre… 

Et comme elles sont virtuelles, tout y serait pardonné, rien n’y serait illicite : on pourrait « jouer » au méchant…

Mais vous voyez bien les risques que cela génère : 

– Ne plus distinguer réalité réelle et réalité virtuelle

– Prendre goût aux pires excès

– Développer des troubles de la personnalité et de l’identité

– …

Et encore : ce n’est pas l’aboutissement de ce que le Metaverse peut générer

Du monde 1 vers le monde 2

La dernière étape du Metaverse pourrait nous entraîner à un niveau où physique, médecine et technologie convergent.

En résumé : plutôt que d’oublier son corps, ou de lui substituer temporairement un avatar virtuel… 

La version finale du Metaverse pourrait nous faire quitter le monde réel, en transférant notre conscience vers l’univers virtuel. 

De quoi en finir définitivement avec la limite asymptotique de l’Homme – son corps.

Je sais, c’est terrifiant. 

Mais ce sont effectivement les jalons, encore lointains, que pose le Metaverse.

On touche ici à un autre sujet, le transhumanisme… ou comment « augmenter » l’humain pour augmenter sa longévité, ses performances, sa cognition… 

Et même si c’est un sujet passionnant, je préfère arrêter ici mon développement – sinon, cette lettre ne finira jamais.

Ce que je veux souligner, c’est que le développement du Metaverse finit par se confondre avec les questions philosophique, éthique et métaphysique. 

C’est peut-être un signe qu’il s’agit là d’une singularité dans notre histoire technologique. 

C’est-à-dire, une découverte qui va transformer l’humanité, avec l’apparition d’une technologie aux possibilités presque infinies qui constitue un point de non-retour…

Mais prenons un peu de recul, avant de conclure.

Utopie ou dystopie ?

J’ai laissé courir mon imagination pour vous donner une idée des possibilités ouvertes par cette technologie. 

Et si j’ai volontairement insisté sur le caractère inquiétant du Metaverse, ce n’est pas forcément une dystopie en gestation – voire pas forcément une dystopie tout court. 

Pour certains, la possibilité d’une deuxième chance – au sens le plus absolu – est une immense source d’espoir.

Pensez aux enfants malades, cloués à l’hôpital, qui pourraient devenir les héros d’une histoire virtuelle…

Pensez aux démunis, ceux qui n’ont pas la chance de voyager, mais qui pourront dans le Metaverse voir à quoi ressemble le Machu Picchu… ou les Moai de l’île de Pâques.

Pensez aux gens trop seuls, chez qui personne ne vient sonner. 

Ceux qui jugulent leur solitude en errant sur le web… Ceux-là aussi appellent de leur vœux un univers aux frontières relatives, un lieu d’échanges, pour se désenclaver.

Pensez aux faibles qui rêvent d’être forts, aux isolés qui se rêvent entourés… aux pauvres qui veulent voir le monde…

Et vous comprendrez qu’il n’y a jamais d’utopie totale, tout comme il n’y a pas de dystopie absolue. 

Les choses sont, comme souvent, plus compliquées qu’en apparence.