Alexis Poulin : « Françafrique : crépuscule d’un empire défunt »
Malgré son amour pour le continent africain et ses tournées diplomatiques à répétition, Emmanuel Macron n’aura pas été le président sauveur de la relation entre la France et l’Afrique. De tubes de raï en sorties maladroites, il en a été le fossoyeur, mettant fin à la coûteuse opération Barkhane, et gesticulant sans trop de conviction, face au dernier coup d’État au Niger.
C’est à l’ancien président ivoirien Félix Houphouët-Boigny que nous devons l’invention du terme Françafrique, en 1955. Dans le théâtre mondial de la géopolitique, la Françafrique a longtemps été une pièce aux multiples actes, oscillant entre le vaudeville et la tragédie. Devenue synonyme d’intrigues, d’opérations clandestines et de liaisons dangereuses, la Françafrique a fini par connaître son crépuscule.
Pourquoi ce système, autrefois florissant, a-t-il trouvé sa fin ?
La première pierre tombale de la Françafrique a été la montée fulgurante de la société civile africaine. À l’ère des réseaux sociaux et de l’information en continu, la jeunesse africaine a cessé d’accepter les récits d’hier et a souhaité une émancipation démocratique. L’accessibilité à internet fournie par les smartphones a créé une nouvelle génération de citoyens engagés. Les médias sociaux sont devenus un outil puissant pour la mobilisation, et un drame pour les médias internationaux francophones, parfois bannis des pays anciennement amis.
L’erreur libyenne et le Printemps arabe
C’est sans doute l’intervention française en Libye en 2011 qui marque l’apogée des erreurs d’appréciation française dans le printemps arabe. Le choix de Nicolas Sarkozy d’ancrer la France sous le leadership otanesque a marqué la fin de l’influence française en Afrique. La légèreté avec laquelle les occidentaux ont détruit le régime de Kadhafi, qui tentait de s’imposer en leader panafricain, contre le dollar et le franc CFA, a précipité le pays dans une crise durable et a permis de générer un effet d’aubaine pour les mafias de traites d’êtres humains dans la région.
Autrefois non alignée, la France se retrouve perdue au moment des printemps arabes, proposant dans un premier temps ses services de conseils policiers en matière de maintien de l’ordre pour assurer la répression du mouvement populaire en Tunisie, avant de comprendre que les temps avaient changé et que la France n’était plus un partenaire de choix.
La déstabilisation de tous les régimes n’a pas abouti à la démocratisation réussie de ces pays, mais en revanche, l’influence française a été laminée par ces mouvements au profit d’autres puissances étrangères, heureuses de prendre la place.
La lutte contre le terrorisme islamiste a été la conséquence directe de la déstabilisation politique de certains pays comme la Syrie, La Libye, ou la région du Sahel. La France a lancé l’opération Serval au Mali pour contrer les groupes djihadistes qui menaçaient Bamako. Cette première intervention a soulevé de nombreuses critiques sur la pertinence de l’ingérence militaire française en Afrique, conduisant la France à prendre le mauvais rôle d’une puissance d’occupation et exacerbant le ressentiment anti-français, malgré certains succès militaires.