33ème Nuit des Molières : le théâtre est mort, vive le théâtre !
Lundi 30 mai, France 3 a diffusé la 33ème nuit des Molières, cérémonie qui récompense le théâtre français.
Censée rendre hommage aux 400 ans du dramaturge, la soirée a pourtant plus tenu de la révérence de que de l’irrévérence…
Présentée par Alex Vizorek, la cérémonie était de retour après son annulation en 2021 car… aucun spectacle n’était en lice à cause de la fermeture des théâtres pendant la crise du Covid.
Le président de l’Académie des Molières, Jean-Marc Dumontet, a donc tenu à placer la soirée sous le signe de la « renaissance » et du « bonheur de se retrouver ».
L’objectif : montrer au public que « le théâtre est toujours vivant ».
Tout va très bien…
Côté “renaissance”, les spectacles primés semblent lui donner raison puisqu’une majorité d’entre eux ont pris le risque d’avoir une distribution nombreuse, donc un budget important (Comme il vous plaira, Berlin Berlin, Les Producteurs, Le Voyage de Gulliver, etc.).
Le théâtre de troupe se porte bien, contrairement à ce que l’on aurait pu craindre après la crise du Covid qui a rendu les producteurs plus frileux.
Enfin, quand on parle de théâtre de troupe, il s’agit surtout du théâtre de troupe parisien !
Car, comme souvent, presque tous les spectacles nommés lors de la cérémonie se jouent à Paris.
On aurait presque pu croire qu’il ne se passe rien dans le reste du pays si Jacques Weber, lors de son discours d’acceptation du Molière d’honneur, n’avait pas mentionné l’existence de théâtres à Nice…
Pour ce qui est du bonheur, il était aussi au rendez-vous dans les discours de remerciement : bonheur de retrouver un public, même masqué et vacciné, bonheur d’avoir été défendus par Roselyne Bachelot lors de la fermeture des salles de spectacles, bonheur d’avoir pour nouvelle Ministre de la Culture Mme Rima Abdul-Malak qui a tant soutenu la culture pendant la crise sanitaire, bonheur de vivre dans une démocratie contrairement aux artistes ukrainiens… Bonheur, bonheur, bonheur.
… malgré quelques orages pendant la soirée !
Du côté de Jacques Weber – encore – qui a mis en garde contre les dangers de la « technocratie et les multiples déclins de la démocratie »…
Ou encore d’Andréa Bescond, accompagnée d’Eric Métayer, qui a déclaré que « le premier quinquennat de Macron n’est pas star […], le second, ça m’étonnerait qu’il le soit »…
Et n’oublions pas, sur un autre sujet, la polémique autour de l’annulation de la venue du mouvement #MeTooThéâtre…
Hormis ces quelques désagréments, la soirée a bien rempli son rôle : dans la joie et la bonne humeur, le monde du théâtre a montré qu’il n’avait (presque) pas souffert de la gestion de la crise.
Alors, Corinne Masiero, nue sur la scène des Césars l’année dernière pour dénoncer les conséquences des mesures sanitaires sur le monde du spectacle et soutenir l’occupation des théâtres, a sans doute dû exagérer…
Tant mieux pour les artistes.
« […] quand vous en venez à la vérité et à l’expérience, vous ne trouvez rien de tout cela ; et il en est comme de ces beaux songes, qui ne vous laissent au réveil que le déplaisir de les avoir crus. »
Béralde, Le Malade Imaginaire, Acte III scène 3
Molière, 1673